mardi 12 octobre 2010

Mato Grosso do Sul et Kaiowà Guarani

Comme je l'ai déjà dit je crois, le Mato Grosso do Sul est un des États où la situation des indiens est réellement dramatique. En effet, c'est là où il y a le moins de terres démarquées et le plus de violence contre les leaders indigènes. Le manque de terre entraîne la promiscuité, et donc la pauvreté, violence et suicides massifs...
La terre occupée par les Guarani dans le Mato Grosso do Sul est passée de 25 à 1% en l'espace de 200 ans...
La population Guarani Kaiowa est l'une des populations du Monde les plus frappées par le suicide... Si cela vous intéresse vous pouvez trouver les chiffres sur internet. Cependant sachez que volontairement les chiffres sont souvent diminués pour plusieurs raisons. Car l'on ne sait jamais trop s'il y a suicide ou s'il y a meurtre maquillé en suicide, car les autorités ne tiennent pas à gonfler ce genre de chiffres, et car, pour les entités pro-indiens ce genre de chiffre sont un genre de prophétie auto-réalisatrice, en effet il est assez connu que plus il y a de suicide dans un milieu, plus un individu est amené à tenter de se suicider, quelle que soit sa situation personnelle.

34 Guarani Kaiowa se sont suicidés en 2008 et 42 ont été assassinés, pour 45 000 Guarani Kaiowa... C'est un nombre absolument énorme, plus important que dans des pays en guerre... En réalité plus important que dans n'importe quel pays...
Cela est bien sûr du aux exactions des fermiers qui expulsent les indiens de "leurs" terres, mais également à la promiscuité, qui entraîne alcoolisme et violence (il y a même des suspections de distribution d'alcool et de drogue de la part des autorités et des fermiers, histoire d'en finir plus rapidement).

Bon effectivement ce n'est pas très gai ce que je vous raconte là, mais en même temps, cela correspond à une réalité, et c'est celle que je vis en ce moment.

Voilà une petite vidéo amateur faîte par l'équipe du CIMI du Mato Grosso do Sul. Je vous préviens il y a des images assez cruelles.





Ceci se déroule dans la communauté d'YPOI, où ont été assassinés deux professeurs Guaranis. L'un des corps n'a toujours pas été retrouvé...
Leurs familles et la communauté demandent à ce que justice soit faîte.

Voilà une petite traduction de ce que l'on peut trouver dans le film.

Début du film :
Sur les banderoles on peut lire :
"Nous voulons la justice", "Guerriers Guarani, votre courage brille dans chaque enfant", "Professeurs Ronildo et Jenivaldo, vous êtes dans nos cœurs".

Ensuite suit le témoignage d'une femme, qui est la fille d'un des professeurs et à qui on a refusé de témoigner en Guarani au tribunal. Le Guarani n'est pas une langue officielle au Brésil, mais la constitution reconnait le droit aux indiens de s'exprimer dans leur langue, y compris à l'école, etc...
La deuxième femme est la mère du professeur qui n'a pas été retrouvé...

Un extrait d'un article paru dans CGNews "L'indien n'en fout pas une, pourquoi est-ce qu'il voudrait de la terre ? Nous sommes prêts, avec les carabines bien graissées." Milton Silva (Vous apprécierez la dentelle...).

"Deux indiens Guaranis du village de Pirajui, dans la municipalité de Paranhos auraient disparus après une tentative avortée d'invasion d'une ferme, dans la région frontalière avec le Paraguay... à 470 km de Campo Grande".

Témoignage : "On est parti de là-bas il y a 27 ans. Mais ce n'est pas parce que l'on voulait, c'est le fermier qui a expulsé mon père. Mais maintenant, nous voulons y retourner parce que c'est notre terre, parce qu'on y a vécu très longtemps, mon père, mon grand-père, mon arrière-grand père et tous nos parents sont enterrés là. C'est pour cela que l'on veut notre terre. C'est pour cela que l'on veut y retourner. "

La femme de Rolindo, avec 4 enfants est se retrouve dans une situation difficile : "Nous manquons de nourriture"... le reste en Guarani.

Impunité : cela fait plus d'un an, et le l'enquête n'est toujours pas finie.
La femme qui pleure est la mère de Jenivaldo. Elle souhaiterait pouvoir retourner dans sa terre, pour enterrer son fils avec les ancêtres.
Omission : les assassins sont toujours libres. Les explications avancées ? L'enquête continue discrètement... Jusqu'à quand ?

Témoignage "Jusqu'à maintenant les autorités ne sont pas venues. Ils ne nous ont rien dit sur ce qui s'était passé, sur celui qui les avait tué. Il est en liberté, dans le coin. Et nous, les parents, nous voulons qu'il soit puni. Vos lois sont très lentes, on attend très longtemps. Et le gars est libre comme ça, mais nous on veut la justice, on veut savoir ce qu'il s'est passé. Il faut chercher jusqu'à savoir ce qu'il s'est passé, qui les a tué. Comme ça, notre âme sera contente, elle sera bien. Mais en attendant notre âme va souffrir, parce que nous souffrons tous ici, comme si cela s'était passé hier. Et ça ne va pas passer tant que la loi, la loi brésilienne ne fera pas quelque chose."

"Nous sommes ici pour notre terre, pour notre Tekoha. Et tant qu'on ne l'aura pas on se battra pour l'avoir."

17 août 2010 : la communauté, fatiguée d'attendre retourne sur sa terre... Mais elle se retrouve assiégée par les contremaitres de la ferme.

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Si vous voulez faire quelque chose,
vous pouvez vous connecter sur le site de Amnesty International Belgique ou encore de Survival selon les affinités ! Le but n'est pas de donner de l'argent, mais simplement d'envoyer un courrier automatique à l'ambassade du Brésil ou au gouverneur du Mato Grosso do Sul (sur le site de Amnesty, vous pouvez jeter un coup d'œil à l'ONG en copie !).

Je me suis beaucoup intéressée pendant ces dernières années aux exactions commises sous les régimes dictatoriaux sud-américains, notamment chiliens et argentins. C'est donc une grande tristesse de constater que les exécutions sommaires, les disparitions et l'impunité sont encore de mise, y compris dans les pays reconnus internationalement comme étant des nouvelles grandes démocraties...

3 commentaires:

  1. Salut Claire,
    super ton blog! Ton stage doit être vraiment prennant et passionnant et très dur parfois... ce qui doit te donner encore plus envie de te battre! Je t'admire beaucoup pour ton courage! Merci également de nous faire partager cette expérience fabuleuse. Grosses bises de Bessans.

    Marion

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  2. C'est impressionnant et effrayant...Le mot démocratie perd encore davantage de sens. Merci de relayer depuis le Brésil.

    à très bientôt

    Tom

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  3. le suicide comme seule issue à une vie dénuée de sens, c'était aussi le cas dans les communautés d'esclave, avec en prime un taux de natalité volontairement bas. Qu'en est -il de ce paramètre chez les indiens?
    cette semaine sur la 5, un documentaire sur les luttes indiennes http://documentaires.france5.fr/documentaires/patagonie-les-couleurs-de-la-discorde ,visisonnable gratuitement jusqu'au 19 octobre, sinon rediffusion le 29 octobre à 0 heure 45.

    "En Patagonie argentine, des indiens Mapuche affrontent le propriétaire de United Color, Luciano Benetton. Atilio Curiñanco, 52 ans, et sa femme Rosa ont décidé de retourner sur la terre de leurs ancêtres en 2002.
    Ils revendiquent 525 hectares qui se trouvent au centre d'un million d'hectares, récupérés en 1991 par le magnat du textile italien.
    Au centre de cette querelle, deux conceptions de la propriété : les Mapuche revendiquent leur appartenance à la terre de leurs ancêtres depuis toujours, alors que Benetton pense que, dans une société mondialisée, la propriété physique doit appartenir à celui qui peut la faire prospérer avec compétence et travail, tout en favorisant la croissance et le bien-être d'autrui.
    Conte de la mondialisation, avec ses interrogations et ses paradoxes, ce film montre l'importance des droits des minorités et alerte sur une autre manière de concevoir le monde et son développement durable".
    FW

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